Les trois J's - Bikepacking à l'arrache.

10/18/2023

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Vendée, France

📸 Captain Films Photography

"Rassurez-moi, vous n'allez pas faire plus de 10 km par jour avec des sac-à-dos comme ça sur votre dos ? "

Il aura fallu l'achat d'un beau vélo gravel haut de gamme, le vol de ce beau vélo gravel haut de gamme, le boost logistique et psychologique prodigué par le site Les Others et le rachat d'un vélo tout aussi beau mais tout aussi peu haut de gamme pour que je me lance enfin dans ma première esquisse de voyage en bikepacking - c'est de l'anglais, et ça signifie en condensé "voyage itinérant à vélo".


Si jamais l'idée d'user l'asphalte à coup de pédales vous a toujours séduit mais vous n'avez jamais fait l'essai de mettre le pied à l'étrier pour plusieurs jours, ce récit vous videra de la moindre once de doute et vous prouvera que même trois branleurs peuvent organiser un voyage mémorable, ceci (presque) sans à-coups, photos de mes pellicules à l'appui …

preparation

L'achat déclencheur

Bien avant de me faire conseiller le fameux podcast "d'aventures et de mésaventures" Les Baladeurs, je connaissais déjà le magazine Les Others pour leur carte Recto Verso qui me faisait de l'œil depuis longtemps. Le principe : au verso, une grande carte ultra détaillée de la France où sont répertoriés tous les sentiers de rando, les véloroutes, les parcs naturels, les parcs marins…etc. Au verso, une méthodologie en 8 étapes pour aider à organiser son voyage ainsi qu'un tas de fiches, classées par département, qui proposent des parcours pour tous les niveaux.


Même si ça sonne comme du sponsoring mal dissimulé, croyez-moi, il n'en est rien et cela vient du cœur. Il y a quelque chose de gratifiant et de stimulant à organiser un voyage - et déjà se sentir partir un peu - avec une vraie carte physique, à l'ancienne, (presque) sans écran. C'est donc en gardant en tête les contraintes de temps et mon entêtement à vouloir rouler près de l'océan que nous avons opté pour la fiche "Épopée maritime de Nantes à Noirmoutier", parcours itinérant de trois jours en Pays-de-la-Loire.

excel de classe mondiale

Comme le montre ci-dessus l'Excel de classe mondiale réalisé par Quentin, le plan initial était de partir plus longtemps et plus loin en se basant sur cette fiche mais les aléas de la vie ont fait que la durée du trip a dû être légèrement raccourcie.

une team au poil

Une équipe de feu

Au sein de l'équipe, trois individus lambda pour lesquels les mots " giclée " et " flinguée " n'avaient alors encore aucun sens :


Quentin Schobbens, cycliste à ses heures en Belgique mais avant tout dessinateur de talent. Premier conseil d'une longue série : pour qu'un voyage à trois se passe correctement, il est essentiel que l'une des pierres angulaires soit conciliation, joie de vivre et facilité incarnés. Cette malléabilité, enrobée d'une personnalité bien faite et bien finie, nous l'avons trouvée en la personne de Quentin, aka Schob. Sans cet homme aux mille qualités, l'équilibre s'effondrait. Son destrier au look rétro prit le nom de Jordy.


schob

Romain Rodesch, cycliste urbain de longue date, d'abord dans les rues bruxelloises et ensuite à Bordeaux où il a lancé son projet d'architecture Norrd. Romain connaît la culture française et nous aidera à nous fondre dans l'environnement. Il est surtout et avant tout le V6 de l'aventure : ce qu'il lui manque d'expérience en cyclisme de route pur et dur, il le compense par une positivité et une niaque sans égal. Romain c'est les tournées, les PMUs, les pauses clope, les cafés bien mérités, la positivité et la joie de vivre incarnés par une blondeur parfaite. Deuxième conseil : toujours s'entourer d'une pierre angulaire inoxydable, ineffritable et insensible à l'érosion. Son compagnon de route, emprunté à un chanceux Nantais, le bicycle Jody.


romain

Enfin, moi, Benjamin Saint Viteux, cycliste urbain avec une expérience minime de ce que j'appelle le vélo pour le vélo - celui qui transcende le simple moyen de transport. Funambule sur un fil oscillant entre ces deux profils ; parfois positif et suiveur, parfois taciturne et ronchon lorsqu'un coup de fatigue ou de spleen vient me faire perdre l'équilibre pour un court moment. Heureusement, de chaque côté de ce fil se trouve un partenaire en or et la traversée se fait au final sans heurs et dans le bonheur. Je suis la troisième pierre angulaire. Ma fidèle bécane s'appellera Josy.


portrait-ben

Choix ou hasard des disponibilités, nous sommes trois pierres aimantées dont les charges sont toujours en équilibre parfait.

en roulant

Un équipement de pointe

Une anecdote en dit long sur le niveau de préparation du voyage. Nous étions à Nantes, équipés et empaquetés, sur le point de commencer notre voyage. Nous prenions un - traduisez toujours "des" pour Romain - café(s pour Romain) avant de nous lancer dans l'aventure. Juxtaposé à la boulangerie se trouvait un réparateur de vélo. Une gentille employée, après nous avoir longtemps guettés par derrière sa vitrine, la conscience lourde et le visage inquiet, vint demander à Quentin : "Rassurez-moi, vous n'allez pas faire plus de 10 km par jour avec des sacs comme ça sur le dos ?", ce à quoi Schob - c'est son surnom - rétorqua avec un grand sourire "Si si, on en a prévu 80 par jour !".


Chapeau bas à Rom et Quent qui ont donc trimballé leur maison sur le dos durant tout le trip. Pour ma part, j'étais équipé de mes deux fontes et j'essayais de leur délester un maximum les épaules.


Un résumé de l'équipement : une tente 3 personnes, un matelas type "yoga" chacun, 2/3 slips, 2/3 t-shirts, une paire de baskets, une gourde chacun, des chambres à air au cas où, une mini pompe à vélo, ces fameuses serviettes de bain qui sèchent rapidement / n'absorbent rien (?), un beau cycliste pour soulager le derrière. Bonus : un maillot chacun, à l'effigie de nos vélos, estampé au Décathlon de Pornic.


Au final, il en faut très peu et l'on finit toujours par ne pas utiliser tout ce qui avait été empaqueté. Chance pour nous : la seule crevaison que nous avons eue était celle de Romain pendant une partie de Mille Bornes endiablée.

Le pont de Saint-Nazaire

J-1 Adieu la ville, bonjour la côte (66km)

Nous nous mettons en selle et chacun prend connaissance des sensations qui seront monnaie courante ces prochains jours. La traversée du pont des 3 continents, vers le sud, marque le début du voyage : nous laissons la ville derrière nous et, alors que nous commençons à longer la Loire vers l'ouest, nous passons devant de magnifiques petits cafés aux belles devantures qui nous font regretter d'avoir le ventre et la jauge de caféine pleins à raz-bord.


L'étape du jour consiste à longer la Loire jusqu'à rejoindre Paimboeuf et ensuite Saint-Brevin-les-Pins. La météo est au beau fixe et nous passons une bonne partie de la journée à longer de magnifiques canaux bordés de chaque côté par une foule d'arbres encourageant à cris sourds nos premières "giclées". Les jambes sont solides, les cœurs sont hauts, les zygomatiques prennent cher.


En milieu d'après-midi, le vent salin de la côte se fait plus ressentir. Au loin, nous commençons à apercevoir le pont de Saint-Nazaire. Au pied nord de l'arche gargantuesque, s'étalent des paysages industriels avec des docks remplis de containers. Heureusement pour nous, c'est vers le pied méridional que nous nous dirigeons. Nous longeons un estuaire bordé de cabanes de pêcheurs, avec sa flore typique du littoral, pour enfin arriver à Saint-Brevin-les-Pins dans un camping qui a carrément un espace dédié aux cyclistes. Nous y passons une première nuit aussi bonne que le confort de notre tente puisse le permettre…

Arrêt gourmand aux abords de Pornic

J-2 On s'enfonce dans les marais (67km)

Le débat qui a le plus tiraillé notre équipe - sans jamais réussir à la diviser - est celui du café matinal : faut-il le prendre first thing first comme boost avant le départ ou alors après avoir déjà avalé quelques kilomètres avec l'idée de le savourer d'autant plus qu'on l'a longtemps attendu et qu'il est désormais mérité. À ce débat, pas de bonne réponse. Dans les faits, nous avons souvent fait le choix de ne pas choisir en optant pour les deux options.


Ce matin-là, c'est donc le ventre viennoisé et le sang caféiné que nous nous mettons en selle pour une journée qui nous fera longer la magnifique Côte de Jade en suivant la Vélodyssée. Nous nous passons passons par par Saint-Michel-Chef-Chef et faisons une escale gourmande à proximité de la belle Pornic.


C'est en après-midi que nous sentons le changement d'ambiance et de paysage en arrivant dans les marais de Lyarne. Nous sommes aux portes de la Vendée. On clôture une belle journée ensoleillée autour de délicieuses sardines au Port du Collet. Cet endroit hors du temps nous fait oublier les moustiques, inhérents aux paysages marécageux.

Les landes de la Vendée

J-3 Land Oh ! Noirmoutiers-en-île, la traversée et le repos bien mérité (71km)

Bien que le voyage ne nous avait jusque-là jamais déçu, cette journée en a vraiment été la cerise sur le gâteau. Nous savions que le soir, nous dormirions sur une île; tu parles d'une belle carotte ! Nous descendons toujours plus au sud et, si la côte n'est pas toujours visible, elle nous fait sentir sa présence par l'iode dont elle imprègne l'air. Nous traversons de vastes landes jonchées de champs de tournesol et d'éoliennes - une sorte de tournesol 2.0.

La traversée du passage du Gois

Vous l'aurez probablement compris mais l'organisation n'est pas forcément le pilier principal et le point fort de notre excursion. Pour arriver sur l'île de Noirmoutier, deux options : traverser le Pont de Noirmoutier ou emprunter le Passage du Gois. La deuxième option nous excite beaucoup plus mais elle nécessite un bon timing car il s'agit d'emprunter le passage submersible lorsque la marée est basse. Heureusement pour nous, la chance fait que tout se goupille parfaitement et nous effectuons une traversée tape-cul mais rudement belle.

Les marais salants de Noirmoutier-en-île

Farniente

Nous avions initialement prévu de passer une nuit sur Noirmoutier avant de repartir vers La Rochelle. Cependant, en voyage, il faut parfois faire le choix de rester et de ralentir. Mieux vaut s'imprégner de peu que de se presser à regarder sans rien y voir.


Nous faisons donc le choix de rester sur Noirmoutier-en-île, avec son vieux centre bucolique, son marché, ses marais salants, ses plages rocailleuses, son beau village du Vieil.


C'est la fin du premier volet des aventures de Jody, Jordy et Josy. Nous laissons les vélos à l'écurie en attendant que le printemps revienne. Prochaine étape : relier Noirmoutier et Biarritz…