Bonjour, qui es-tu ?

John Noesen, enthousiaste avec plusieurs casquettes. En septembre 2022, j'ai lancé avec Rodolphe Bestgen une petite vodka délicieuse sous le nom de Patatas.

Eh bien enchanté John ! Raconte-nous un peu la genèse du projet.

John Noesen: Le but premier du projet c'était de réutiliser les pommes de terre gaspillées. Pour la petite histoire, en 2019, il y a eu un énorme surplus de patates. Ce surplus a été causé, dans un premier temps, par un prix des pommes de terre hyper élevé, ce qui a mené à une surproduction des agriculteurs qui se sont ensuite retrouvé fistés à avoir une offre beaucoup plus importante que la demande ; au point où l'on détruisait des pommes de terre pour pouvoir maintenir les prix.

On a lu ça ("on" étant John et Rodolphe, son partenaire dans l'aventure) et on s'est dit: "Allez, c'est quand même stupide, dans le pays de la pomme de terre !". Le lien a ensuite vite été fait entre pomme de terre et vodka.

Est-ce que l'année 2023 a été une bonne année pour Patatas ?

À fond ! Ce qui est génial c'est qu'on a voulu faire un produit qui soit rassembleur, qui puisse être dégusté aussi bien sur des évènements qu'en petit comité. Cela mène à de belles rencontres et c'est assez fun !

On a par exemple fait un pairing avec des huîtres au café Chez Ta Mère à Fernand Coq et une collaboration avec le restaurant Brut en créant 5 plats à base de Patatas. Nous avons aussi été sur pas mal d'évènements pour proposer des cocktails à base de Patatas (pour des super tips cocktail, tenir jusqu'au bout de cet article).

Est-ce que tu peux nous expliquer d'où viennent ces pommes de terre sauvées de justesse des invendus ?

Elles viennent de Villers-la-Ville. Patatas c'est: "des pommes de terre de Villers-la-Ville, distillées à Schaerbeek et dégustées à Bruxelles" ou encore "50 km entre la pomme de terre et le verre à shot" - rire.

Est-ce que cela a été compliqué de trouver la recette parfaite 👌 ?

On a eu beaucoup de mal à trouver une distillerie qui avait le matériel et les connaissances nécessaires pour distiller une vodka à base de pomme de terre - contrairement aux idées reçues, la plupart des vodkas sont fabriquées à base de blé ! C'est finalement en la personne de Serges Brabant, maître distillateur à la Brussels Distillery, qu'on a trouvé notre ange salvateur.

Trouver la recette nous a pris deux ans. On travaillait sur des petits alambics illégaux de 1 litre et c'était assez inquiétant. Tu crées une recette sur base de cet unique litre mais pendant tout le processus, tu entends des gens te répéter "tu vas voir quand tu vas le faire en grande quantité ça va être complètement différent !". Du coup, quand on s'est retrouvés avec Serges à goûter le premier extrait distillé sur un vrai alambic, on a été hyper contents et satisfaits de constater qu'on avait exactement ce qu'on attendait, une vodka douce et onctueuse.

Qu'est-ce que tu répondrais aux gens qui te disent "Oh non ! pas de la vodka : c'est dégueulasse et ça donne mal à la tête !" ?

Nous on adore entendre cette phrase ! C'est vraiment un plaisir de surprendre les gens et de leur montrer que la vodka peut aussi être dégustée. C'est un retournement d'attentes dont on ne se lasse pas !

De nos jours, les choses ont évoluées et on fait beaucoup de vodka - souvent à base de blé - qui est juste destinée à être mélangée et dont le goût importe finalement très peu. Il y a une dichotomie entre le côté chic de la vodka avec des marques comme Belvedere et Grey Goose et la réputation d'alcool de merde, brûlant et médical qui lui colle à la peau.

Il faut aussi savoir qu'à la base, une bonne vodka, selon la philosophie russe, ça se veut hyper neutre ; le but est d'avoir un alcool qui passe presque comme de l'eau. Nous on fait plutôt l’inverse en tendant vers la saveur tout en gardant une bonne douceur.

Comment c'est un lendemain de veille après une soirée à la Patatas ?

Ça fait partie des résultats bien satisfaisants de ce projet. Pendant le développement, on se dit que rien n'est garanti et que d'appliquer le procédé artisanal "bien comme il faut" ne donnera pas forcément le résultat savoureux escompté. Ça reste de l'alcool fort et vu ce à quoi on est habitué - surtout en terme de vodka - on ne pouvait pas exclure que ce soit dur à boire, et dur sur la tête le lendemain !

Avec un an de recul, je peux enfin dire avec certitude que la Patatas ne donne pas de gueule de bois ; on est sur un petit nuage avec un peu de fatigue mais comblé par la satisfaction d'avoir bu un alcool de qualité en bonne compagnie. Après tout, c'est logique : pas d'intrants, pas d'additifs, pas d'ingrédients secrets. C'est essentiellement un ferment de pommes de terre distillé, et pas grand-chose d'autre.